« 30 % des diabétiques sont dénutris ! »

dénutrition arthroplastie hancheLes diabétiques sont-ils plus vulnérables face à la dénutrition ?
Il faut être, comme avec tout patient, très vigilant au risque de dénutrition chez les diabétiques, et d’autant plus avec l’avancée en âge. Les diabétiques sont plus sensibles aux infections, du fait d’une immunité moins bonne, sont sujets à une capacité de cicatrisation altérée pouvant être encore aggravée par la dénutrition, et à risque, notamment chez les plus âgés, de fonte musculaire, source de handicap supplémentaire se rajoutant dans les formes compliquées de diabète à l’artériopathie et au « pied diabétique ». Ainsi, pour ne pas amplifier les comorbidités liées au diabète, il faudra veiller à assurer un bon apport nutritionnel, car la dénutrition aggrave l’état de santé général. Une attention toute particulière sera portée aux personnes âgées (plus de 70 ans).

 

La dénutrition se manifeste-t-elle de la même manière chez les diabétiques ?
Je ne vois pas de différence, pour un âge comparable, chez les patients diabétiques de types 1 et 2 (DT1 et 2). On observe les mêmes manifestions cliniques et étiologiques. Je dirais seulement que pour les DT2, dont environ 80 % sont en situation d’obésité, il peut être parfois plus difficile de diagnostiquer la dénutrition, le poids élevé rendant plus difficile l’évaluation de l’état nutritionnel. Nous avons d’ailleurs rajouté une section dans les recommandations de la HAS pour la personne âgée de 70 ans en situation d’obésité : une personne âgée en situation d’obésité́ peut être dénutrie. Le diagnostic repose sur l’association d’1 critère phénotypique et d’1 critère étiologique.

Pour faire le diagnostic de dénutrition chez la personne âgée en situation d’obésité, il est recommandé d’utiliser les critères phénotypiques suivants (1 seul critère suffit) :
• perte de poids ≥ 5 % en 1 mois ou ≥ 10% en 6 mois ou ≥ 10% par rapport au poids habituel avant le début de la maladie ;
• sarcopénie confirmée.
• La surveillance de l’état nutritionnel des personnes âgées en situation d’obésité est identique à celle des personnes âgées non en situation d’obésité et doit donc être régulière en ville, à l’hôpital et en Ehpad/USLD.

 

Quelle est la prise en charge ?
La prise en charge des diabétiques dénutris devra être de même nature, mais nous publierons de nouvelles recommandations courant 2022. Et je rajouterai qu’il faudra particulièrement faire attention au niveau de l’apport protéique !
Pour les DT2, on peut prescrire des CNO, comme pour les autres patients, mais à condition qu’ils soient hypoglucidiques.
Avec les CNO, il faut toujours vérifier, dans les premiers jours d’utilisation, avec un autocontrôle glycémique, que ces apports nutritifs ne déséquilibrent pas le diabète ; sinon ils sont à prescrire comme chez les autres patients, aux mêmes conditions.

 

Quels sont les points-clés pour la pratique ?
Il faut la même attention que chez les non diabétiques : il faut peser, suivre le poids au fil des consultations, noter la perte de poids, rechercher des facteurs favorisant la dénutrition. Pour les diabétiques, ce sont les comorbidités dont nous avons parlé plus tôt qui augmentent le risque de dénutrition. En tout cas, ce n’est pas parce qu’ils sont diabétiques ou obèses que les patients ne peuvent pas être dénutris, et les conséquences peuvent être plus graves, car les diabétiques sont plus vulnérables aux conséquences de la dénutrition, en particulier s’ils sont âgés.