Si l’évaluation nutritionnelle des patients recevant une prescription de CNO à l’hôpital est satisfaisante au moment de leur admission, les pratiques sont beaucoup plus hétérogènes pendant et après le séjour à l’hôpital. Une standardisation des messages vis-à-vis des CNO est primordiale pour homogénéiser les pratiques des différents acteurs.
Les données épidémiologiques françaises évaluent la prévalence de dénutrition à l’hôpital autour de 30 %. Une étude récente a examiné les pratiques vis-à-vis de l’évaluation nutritionnelle des patients ayant reçu une prescription de CNO à l’hôpital. Pendant une période de 11 semaines, tous les patients de deux services hospitaliers (endocrinologie et chirurgie digestive) recevant une prescription de CNO et ce, quel que soit leur état nutritionnel, ont été inclus dans l’étude, soit 61 patients, âgés en moyenne de 65,4 ± 16,0 ans avec une durée moyenne d’hospitalisation de 10 ± 4 jours. Une évaluation du suivi nutritionnel de ces patients a ainsi été effectuée à l’admission, pendant le séjour à l’hôpital et après l’hospitalisation. Des entretiens semi-directifs ont également été menés auprès de ces 61 patients, de 11 internes en médecine et de 11 aides-soignants, afin de mieux comprendre leurs représentations et attitudes vis-à-vis des CNO.
Les résultats montrent tout d’abord que, à l’admission, parmi les 61 patients ayant reçu une prescription de CNO, 39,3 % souffraient de malnutrition sévère, 21,3 % de malnutrition modérée et 39,3 % n’étaient pas dénutris, mais avaient de faibles apports alimentaires pendant leur hospitalisation.
L’évaluation nutritionnelle de ces patients à l’admission est qualifiée de satisfaisante par les auteurs, avec un Indice de Masse Corporelle (IMC) mesuré dans 87 % des cas et des concentrations en albumine, préalbumine et protéine C Réactive (CRP) mesurées chez respectivement 99, 88 et 97 % des patients. Pendant le séjour à l’hôpital (durée moyenne de 10 ± 4 jours), les patients souffrant de malnutrition modérée ont été pesés moins fréquemment que ceux présentant une malnutrition sévère (38,5 vs 80,0 % ; P = 0,025) ; les mesures d’albumine et de préalbumine ont également été réalisées moins souvent dans les cas de malnutritions modérées. Après l’hospitalisation, une prescription de CNO a été faite pour 68 % des patients qui étaient, à l’admission, sévèrement dénutris et pour 44 % de ceux qui présentaient une dénutrition modérée.
L’analyse qualitative met en évidence de fortes différences dans la représentation des CNO : si les internes prescripteurs considèrent les CNO principalement comme des médicaments, les aides-soignants qui administrent les CNO les considèrent comme des compléments alimentaires. Enfin, la représentation des CNO chez les patients est très hétérogène : en fonction des patients, ils sont perçus comme des médicaments, des compléments alimentaires ou des aliments.
De plus, les interviews mettent aussi en avant :
- un manque d’information sur les CNO, perçu par les internes,
- des connaissances limitées des aides-soignants sur la prescription et l’observance vis-à-vis des CNO,
- une non prise en compte des préférences des patients dans les prescriptions de CNO.
Pour conclure, cette étude met en évidence des axes d’amélioration du suivi nutritionnel des patients dénutris à l’hôpital. Elle souligne également le besoin d’homogénéiser les connaissances et les représentations des CNO entre les personnes qui les prescrivent, les administrent et les consomment, afin d’améliorer l’observance et la prise en charge des patients dénutris.
Référence :
BRINDISI, MC. NOACCO, A. AIT BOUDAOUD HANSAL, A. « et col. » Delivery of oral nutrition supplement in hospital: evaluation of professional practices in evaluation of nutritional status and representations of ONS by the caregivers and patients. Clinical Nutrition ESPEN, 2020, 35, p. 85-89 (doi: 10.1016/j.clnesp.2019.11.005).