Comment vous êtes-vous intéressé à la dénutrition ?
C’est une longue histoire ! Ma spécialité initiale était la pneumologie. Comme beaucoup de pneumologues, je me suis formé à la réanimation. C’est en réanimation, lorsque les malades sont intubés et qu’ils ne peuvent donc plus manger que j’ai commencé à m’intéresser à la nutrition.
J’ai ensuite été nommé responsable de l’unité de nutrition artificielle de l’hôpital qui gère de manière transversale la nutrition parentérale des patients hospitalisés mais aussi à domicile. À Grenoble, comme dans tous les hôpitaux français, on observe qu’environ 30 % des patients de l’hôpital sont dénutris. Il est donc impossible de faire un service dédié ! Beaucoup de ces patients nécessitent un soin diététique et certains une nutrition artificielle.
Quel est le message clé que la 2e Semaine de la dénutrition souhaite faire passer ?
Les autorités sanitaires reconnaissent qu’il y a environ 2 millions de personnes dénutries en France. L’an dernier, avec le Collectif de lutte contre la dénutrition, nous avions réussi à sensibiliser les professionnels de santé et le grand public au fait que la dénutrition existe, que c’est une maladie, fréquente, et qu’elle est traitable.
Cette année, nous voulons les sensibiliser au dépistage car la seule manière de diagnostiquer la dénutrition, c’est de se peser régulièrement. Le message à faire passer au grand public est : « Pesez-vous ! », régulièrement, une fois par mois par exemple. Et, contrairement aux idées reçues, véhiculées par une (trop) grande partie des médias, maigrir n’est pas un but mais plutôt un signe, voire un symptôme, dont il faut rechercher la cause. Au-delà de 3 kg perdus, consultez votre médecin car il faut investiguer.
Pourquoi une perte de poids nécessite une consultation ?
Généralement, les patients sont contents de perdre du poids, et râlent s’ils en prennent… Il est temps que cette généralité s’inverse : une perte de 3 kg sur 1 an, par exemple, peut s’expliquer de différentes manières (changement de rythme de vie, d’alimentation, départ à la retraite, remise au sport, etc.), pas forcément pathologiques, mais il est important d’avoir l’explication.
En revanche, perdre 3 kg en 1 mois sans l’avoir voulu, ce n’est pas normal, cela a toujours une cause, qui peut être grave.
Et c’est d’ailleurs valable à tout âge ! Car, en réalité, le poids d’un adulte varie peu pendant la vie, il reste stable. Chez les enfants, la perte de poids est rare, c’est un arrêt de la croissance qui doit alerter.
Comment l’expliquer aux patients ?
Il faut dire aux patients que si leur poids leur permet de rester en bonne santé (pas de pathologies associées, de surpoids, etc.), il n’y a pas raison particulière de chercher à maigrir. Un poids stable est bien plus important !
Si pour une raison médicale ou esthétique, les gens veulent maigrir, il faut savoir qu’il est plus utile de maigrir lentement, car en maigrissant vite, on perd du muscle, pas de la graisse !