Semaine dénutrition 2024

Accompagner les personnes fragiles pour lutter contre la dénutrition

Amandine Antier, diététicienne vannetaise, propose un suivi à domicile pour des patients fragiles souffrant de dénutrition. Elle s’est spécialisée dans le suivi des personnes âgées et des personnes souffrant de cancer. Retour sur son activité d’accompagnement mêlant nutrition et humanité.

 

Comment se déroulent vos séances de consultation à domicile ?

Je suis spécialisée dans les patients âgés ou malades ayant des pathologies assez lourdes comme des cancers. Ils me contactent directement pour un suivi à domicile, car j’ai ces spécificités. Je me rends chez eux et puis je fais un premier point diététique sur leurs besoins, les attentes. Par la suite, je mets en place des protocoles qui leur correspondent.

 

Quels avantages présentent ces consultations par rapport aux consultations classiques ?

En général, quand on entend diététique, on pense toujours aux régimes restrictifs. Là, c’est pour apporter de bonnes calories, dont les protéines. Je me rends à domicile puisqu’en général ce sont des patients qui sont assez faibles ou qui n’ont pas forcément le temps ou l’envie de se déplacer.

Je leur demande s’ils ont une perte d’appétit, une perte de poids brutale. Pour déterminer le critère de sévérité, je regarde aussi leur prise de sang pour avoir leur niveau d’albumine.

Ainsi, je peux leur notifier s’ils sont dénutris sévères ou modérés, mais en général ils n’ont pas forcément l’information. J’essaie au maximum de les sensibiliser lorsqu’ils ne le sont pas encore.

Je trouve que c’est bénéfique de pouvoir se rendre directement à la maison pour que tout le monde puisse bénéficier d’une prise en charge diététique.

 

Est-ce qu’il y a des points particuliers où vous devez être particulièrement vigilante lors de vos consultations ?

Je leur donne toutes les informations que j’ai en ma possession sur les risques de dénutrition et sur comment y pallier. Je leur explique qu’il faut s’alimenter correctement et à sa faim, qu’il faut majorer les calories et les protéines. Je fais aussi un rappel sur les aliments les plus riches en protéines, les plus riches en calories, sur comment fractionner son alimentation. Quand les ingesta sont très limités, je propose et je parle souvent des compléments nutritionnels oraux (CNO). Je n’ai pas la possibilité de les prescrire directement au patient, mais seulement de les recommander. Par contre, je me charge de faire la demande de prescription auprès du médecin traitant afin que le patient puisse plus facilement se rendre en pharmacie pour suivre les préconisations.

 

Quelle place a l’utilisation régulière des CNO dans la prise en charge des patients dénutris ?

Je conseille surtout de les utiliser en complément. Il est important d’éviter de remplacer son alimentation complète par la prise de compléments nutritionnels. Donc quand j’évoque le fait de fractionner son alimentation, je leur dis de prendre par exemple un demi-CNO au cours de la matinée, puis de le terminer dans l’après-midi ou bien en fin de repas à la place du dessert. C’est assez facile à mettre en place puisqu’il s’agit de produits assez riches en protéines et en calories, donc ils peuvent compenser un repas plus léger qu’ils ont l’habitude de faire.

De ce que je peux voir, le sucré passe plus facilement et la texture reste encore compliquée pour certains. Donc je leur recommande de le diluer avec un petit peu de lait pour que ce soit moins dense en bouche. L’avantage des CNO, c’est la diversité des gammes disponibles. Il y en a sous forme de biscuits, de gâteaux, des crèmes desserts, des compotes ou des jus de fruits. Donc nous les testons jusqu’à ce qu’ils conviennent aux patients.

 

Comment ajustez-vous l’utilisation de ces CNO en fonction des besoins spécifiques des patients par rapport à leur restriction alimentaire ou leurs préférences personnelles ?

Je fais mes petits calculs par rapport à leurs besoins caloriques, à ce qu’ils peuvent manger et à ce qu’ils arrivent à manger. En général, pour les patients dénutris modérément, je leur propose des enrichissements naturels, en ajoutant du jambon mouliné ou de la poudre de lait dans leurs préparations par exemple. S’il manque des calories ou si les journées sont vraiment fluctuantes, alors je mets en place un CNO en fonction de leurs besoins. En général, je recommande d’en prendre un à deux par jour. Le risque qu’il y a quand ils en prennent plus, c’est qu’ils finissent par se lasser, ce qui entraîne l’arrêt de toutes prises de compléments nutritionnels.

 

Comment organisez-vous un suivi régulier à vos patients ?

Je recommande un suivi par mois minimum, mais ils ont aussi la possibilité de me joindre par téléphone et il n’y a aucune obligation. J’ai des patients que je ne vois qu’une fois, à qui je donne des recommandations et qui ne souhaitent pas reprendre rendez-vous tout de suite. Donc je prends des nouvelles de temps en temps et je reste à leur disposition s’ils souhaitent continuer le suivi.

Ces consultations leur font du bien. Je suis là pour les remotiver quand ça ne va pas. C’est une occasion de créer un lien, une proximité et de créer une forme de confiance. Donc ils savent que je suis là pour leur apporter du positif et que c’est dans leur intérêt. Après, comme je leur explique à chaque fois, moi je suis là pour eux, pour les conseiller, ils n’ont aucune obligation derrière.

Je n’irai pas vérifier si le stock de CNO diminue, si le frigo est bien plein ou si les courses ont été faites. Je pense que s’ils demandent à me revoir c’est aussi parce qu’ils ont envie et que cela fonctionne comme ça. Donc on maintient les suivis une fois par mois lorsque la prise en charge le nécessite.

 

En tant que diététicienne à domicile, quels sont les défis que vous rencontrez et comment arrivez-vous à les surmonter ?

Étant nouvelle sur le secteur vannetais, j’essaie de me faire connaître par un maximum d’intervenants de la santé. J’ai rencontré des pharmaciens, des médecins généralistes, des équipes de diététiciennes des hôpitaux et cliniques du secteur. Je prends aussi contact avec les infirmières qui sont parfois au cœur des prises en charge et les associations locales. Je crée progressivement mon réseau afin de faire connaître mon activité et mes services.

Je multiplie aussi mes activités, en proposant des formations auprès des personnes âgées via des associations.